L'Arabie saoudite a condamné une professeure de fitness à onze ans de prison pour avoir posté des photos en tenue de sport

Manahel al-Otaibi, une jeune saoudienne de 29 ans, a été condamnée à 11 ans de prison pour avoir publié des photos de tenues jugées "indécentes" et pour avoir tenu des propos féministes.

(FILES) Saudi Manahel al-Otaibi, a 25-year-old activist, walks in western clothes in the Saudi capital Riyadh on September 2, 2019. Human rights groups denounced on April 30, 2024 an 11-year prison term handed down by a counterterrorism court to a Saudi fitness instructor and women's rights activist. The judgement against 29-year-old Otaibi was issued on January 9 but only made public
L'Arabie saoudite a condamné une professeure de fitness à onze ans de prison pour avoir posté des photos en tenue de sport. (Photo by FAYEZ NURELDINE/AFP via Getty Images)

Professeure de fitness, Manahel al-Otaibi, 29 ans, avait pour habitude de poster des photos d'elle sur les réseaux sociaux, notamment Snapchat, en tenue de sport ou en robe notamment, dans un centre commercial, entre autres. Souriante, elle posait, ses longs cheveux noirs apparents et détachés. Par ailleurs, elle utilisait les plateformes pour dénoncer la condition des femmes dans son pays. Un acte extrêmement courageux qui lui a coûté onze ans de prison, selon plusieurs ONG de défense des droits humains. Le 9 janvier 2024, le Tribunal pénal spécial l'a en effet condamnée à l’issue d’un procès tenu en secret, a rapporté Amnesty International.

Car si son profil peut ressembler à celui d'une influenceuse lambda, il n'en est rien. Manahel al-Otaibi est saoudienne. Elle vit donc en Arabie saoudite, dans un pays qui a levé l'obligation de porter l'abaya, une tenue recouvrant les cheveux et le corps, depuis 2018 seulement. De plus, dans les faits, de nombreuses femmes se plaignent d'être toujours contraintes de la porter malgré tout.

S'habiller "légèrement", en tant que femme, c'est donc prendre un véritable risque. Officiellement, Manahel al-Otaibi a été emprisonnée pour "infractions terroristes" bien qu'aucune des infractions reprochées n'aient été précisées. Actuellement derrière les barreaux, la jeune femme se serait cassé la jambe après avoir été rouée de coups, et n'a pas accès à des soins médicaux. Manahel al Otaibi a été arrêtée le 16 novembre 2022 et accusée d’avoir enfreint la Loi relative à la lutte contre la cybercriminalité, en raison de ses photos et de ses tweets comportant des hashtags en faveur des droits des femmes.

Selon des documents de procédure qu’Amnesty International a pu consulter, Manahel al Otaibi est poursuivie pour "publication et diffusion de contenu comportant la commission de péchés en public et incitant des personnes, notamment des filles, dans la société à renoncer aux principes religieux et aux valeurs sociales ainsi qu’à porter atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs sur son compte Twitter."

Amnesty International appelle à la libération immédiate de la militante. Par ailleurs, l'ONG exige une enquête "efficace" et "impartiale" quant à ses conditions de détention.

Paradoxalement, le royaume saoudien, qui a autorisé les femmes à conduire seulement depuis 2018, a été choisi pour présider la 69ème Commission onusienne de la condition des femmes en 2025. Trois ans plus tôt, le choix de l’Iran pour sa présidence en 2021 avait déjà suscité des contestations. Le choix de l'Arabie Saoudite est une décision controversée au vu des conditions de vie des Saoudiennes, et du sort réservé aux militantes pour l'émancipation, que les récentes réformes ne sauraient invisibiliser.

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