Une peintre amatrice revisite "L’Origine du monde" de Courbet, le maire de Saint-Raphaël censure ses toiles

Dans le cadre d’une exposition ayant pour thème les toiles de maîtres revisitées, Dominique François a présenté deux toiles jugées d’une "vulgarité absolue" par la mairie.

Bien que présentant un sexe nu de femme, l’œuvre de Gustave Courbet n’a jamais été censurée. Ce qui est de moins en moins le cas ces dernières années, notamment sur les réseaux sociaux.

CULTURE - L’origine du scandale. La confusion règne dans la commune de Saint-Raphaël (Var), où le travail d’une artiste amatrice a visiblement provoqué des crises d’urticaire aux membres de la municipalité, choqués par son travail sur l’une des œuvres les plus célèbres du peintre Gustave Courbet, L’Origine du Monde.

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Comme le raconte ce dimanche 19 mai Var-Matin, tout commence par une simple exposition de l’association raphaëloise Palette 83, ayant pour thème les toiles de maîtres revisitées. Chaque artiste peintre ayant pour objectif de choisir l’œuvre d’un maître décédé depuis plus de 70 ans (pour une question de droits d’auteur) afin de la réinterpréter.

Parmi ces revisites, celle de Dominique François n’est pas passée inaperçu, bien au contraire.

La réinterprétation effectuée par cette peintre amatrice se décline en deux propositions distinctes. La première voit le sexe de la modèle Constance Quéniaux revêtue d’une culotte peinte quand la seconde est simplement recouverte d’un vrai sous-vêtement féminin directement collé sur la toile. « La seconde version est, je le reconnais, peut-être un peu provocatrice car il est possible de soulever le sous-vêtement. Je l’ai d’ailleurs réintitulé L’origine de la mode », explique avec malice la créatrice des deux toiles polémiques au journal local.

Bien que validés par le bureau de l’association, les deux tableaux n’ont pas survécu à la censure de la municipalité varoise. Et n’ont d’ailleurs jamais été accrochés dans le cadre de l’exposition, de l’aveu de l’autrice, passablement énervée par cette censure incompréhensible. Ses œuvres ne sont d’ailleurs pas les seules, Var-Matin cite notamment le travail d’un autre artiste censuré pour avoir fait apparaître une femme nue sur La naissance de Vénus de Sandro Botticelli.

Une censure de courte durée pour ce dernier tableau, mais pas pour ceux de Dominique François. Du côté de la mairie, à l’origine de cette censure, le maire Frédéric Masquelier défend le choix du personnel municipal en estimant que ces deux tableaux sont d’une « vulgarité absolue ».

« On m’a rapporté que ces réinterprétations ont suscité un émoi auprès de différentes personnes de la municipalité qui les ont considérés comme étant vulgaires. Donc j’ai accepté de les retirer », confirme l’édile, qui estime que « l’original de L’origine du monde de Gustave Courbet n’est en rien vulgaire ».

Frédéric Masquelier refuse également que des enfants soient potentiellement confrontés à ces deux toiles, car « ils n’en apprendraient rien d’autre que de la vulgarité », d’où sont choix de les faire retirer, ce qui n’est pas la première fois avec des œuvres, comme il l’admet lui-même.

Interrogé par le journal sur son regard sur la nudité dans l’art, le maire de Saint-Raphaël botte en touche et répond qu’il n’a pas de « position générale vis-à-vis de cela. La manière de présenter les choses peut rendre le résultat plus ou moins vulgaire ».

Invitée à s’exprimer sur la censure des deux tableaux de son adhérente, la présidente de l’association a quant à elle refuser de s’exprimer, « pour ne pas participer à cette polémique ». Dominique François, elle, regrette que l’on confonde encore « l’art et la pornographie. D’autant plus que j’ai habillé l’original qui est normalement nu. C’est incompréhensible ».

Un deux poids, deux mesures étrange. D’autant plus quand on connaît l’histoire de ce tableau faussement subversif et à l’origine de nombreux fantasmes alors qu’il aura mis de nombreuses années avant d’être réellement dévoilé au public, bien après sa création en 1866. Souvent considérée comme subversive, voire choquante, L’Origine du monde est en réalité le fruit d’une commande privée longtemps restée cachée.

Passée de main en main, tout en restant cachée, voilée ou recouverte par un autre tableau, la toile de Courbet n’a finalement été exposée publiquement qu’en 1988 à New York. Désormais exposé au Musée d’Orsay, à Paris, l’œuvre fait surtout parler d’elle pour sa censure sur les réseaux sociaux depuis 2011 et les premières désactivations de compte d’utilisateurs Facebook utilisant l’œuvre comme photo de profil, comme le rappelle France Culture.

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